Golf du Gouverneur (DR)
Golf du Gouverneur (DR)

Golf du Gouverneur, un label au-delà d'étangs

Déjà détenteur du label Argent du Programme & Label Golf pour la biodiversité de la Fédération française de golf et du Muséum national d'histoire naturelle, le domaine niché dans les Dombes, au-dessus de Lyon, vise désormais l'or en s'appuyant sur deux points forts : la richesse des espèces animales et végétales qu'il abrite et les efforts écologiques consentis pour s'adapter aux restrictions d'eau dans ce décor bondé d'étangs.

Les Dombes, « le territoire aux 1 000 étangs » comme on l'appelle dans cette région naturelle et historique de l'Ain, à une demi-heure au nord de Lyon. C'est là, depuis 1992, sur un plateau d'origine morainique, très précisément à Monthieux, que trône le golf du Gouverneur avec ses deux parcours de 18 trous et celui d'école (La Soche).

D'un côté, le Breuil (6 432 m, par-72), dessiné par les foins, avec de l'eau en jeu sur 12 trous, qui a notamment accueilli le Challenge Tour entre 2008 et 2011. De l'autre, le Montaplan (5 935 m, par-71), très étroit avec des greens fortement vallonnés et des hautes herbes pour délimiter les fairways dès que le printemps sévit. Au milieu, partout en fait, à perte de vue, la nature, éternelle, resplendissante dans cet univers majestueux du plus grand golf de la région Rhône-Alpes, riche de 800 membres dont 80 talents en herbe à l'école de golf.

Ce cadre enchanteur et précieux, Germain Ruste y tient comme à la prunelle de ses yeux : « Notre attachement au patrimoine est autant lié à la configuration des lieux, qui engendre une certaine obligation, qu'à une philosophie de vie. Nous avons toujours préservé et développé la biodiversité. » Directeur des lieux depuis 2017, à la tête d'une équipe de 26 permanents dont 5 jardiniers, il est fier d'avoir accueilli « beaucoup de grosses épreuves fédérales du calendrier amateur comme les Internationaux de France dames, les Championnats de France cadets à trois reprises, ceux de jeunes et bientôt les Championnats de France U16 garçons et U18 filles. »

295 espèces végétales, 170 animales

Détenu par une famille jurassienne, le Gouverneur est plébiscité, reconnu et même distingué. En 2022, après évaluation des richesses écologiques (diversité, fonctionnalité, patrimonialité), il a d'ailleurs obtenu le label Argent du Golf pour la biodiversité, décerné la FFGolf avec l'appui du Muséum national d'histoire naturelle. Germain Ruste y a vu un retour sur investissement : « La richesse sur site et les actions menées depuis de nombreuses années ont été récompensées. » Greenkeeper au Gouverneur depuis son ouverture, Christophe Prévalet adapte forcément son quotidien au trésor à préserver : « Sur site, il y a différentes espèces végétales et animales, longtemps en voie d'extension et qui recolonisent le biotope, sont protégées, comme les crapauds calamites, le crabier chevelu (échassier pécheur dans des hauts-fonds) et quelques orchidées spécifiques des milieux humides. Si on n'est pas vigilants sur l'épandage de phyto et d'engrais, on perd encore des espèces. On est passés en bio depuis quatre ans. Aujourd'hui, on n'aurait plus le droit de construire un golf dans cette zone, l'une des dernières grandes zones humides avec la Sologne, la Camargue et la Brenne. »

Le rapport justifiant la labélisation argentée s'avère dithyrambique, saluant « la gestion concertée associant la pratique du golf, les productions paysannes (agricoles, piscicoles) et la biodiversité », estimant même que « ce golf a tout le potentiel pour devenir un exemple en la matière ». La richesse de la faune et de la flore y est détaillée : 24 habitats recensés (12 dans les milieux humides ; 4 dans les prairies ; 4 dans les landes, haies et fourrés ; 4 dans les boisements et forêts). 295 espèces végétales observées, 170 espèces animales identifiées (80 d'oiseaux, 6 de reptiles, 5 d'amphibiens, 30 de papillons, 23 de libellules...).

Si on n'est pas vigilants sur l'épandage de phyto et d'engrais, on perd encore des espèces. On est passés en bio depuis quatre ans. Aujourd'hui, on n'aurait plus le droit de construire un golf dans cette zone

Christophe Prévalet

D'autres points sont surlignés comme la gestion des mares et des étangs, l'absence de clôtures autour du golf et les actions menées par la direction du site au-delà de son propre territoire, avec des programmes de restauration et préservation d'activités traditionnelles, comme la pisciculture, ou encore l'utilisation de races anciennes de chevaux pour l'entretien de certains terrains (préservation de mosaïque bocagère).

Trois bassins naturels de réserve d'eau

Germain Ruste voit plus loin et vise désormais le label or : « On va devoir faire plus d'efforts et montrer une amélioration du patrimoine depuis trois-quatre ans, un développement des espèces, le développement d'habitats, des actions de communication comme un club junior qui a ouvert le 1er mai, avec un objectif éducatif sur la biodiversité, la découverte de la faune et la flore. Gagner l'or ne nous amènerait rien de particulier sauf une nouvelle reconnaissance de notre respect de la nature. »

Elle n'est pourtant pas toujours tendre dans la région. Le climat évolue et Germain Ruste s'adapte : « Paradoxe ultime en étant encerclés d'eau, nous sommes en zone de restriction maximale d'utilisation d'eau depuis sept ans car les nappes phréatiques sont vides. Pour pallier les gros soucis d'irrigation, nous avons procédé à la réfection du système, ce qui a permis d'économiser 50 % d'eau. Christophe Prévalet connaît tous les tuyaux du golf. » Au propre comme au figuré. La parole est au greenkeeper : « Le taux de pluviométrie est de 950 mm par an, on est même tombé à 615 mm en 2016. Il y avait 1 200 mm au début des années 2000. Lors de la rénovation d'étangs, voilà 15 ans, on avait créé des réserves d'eau pour avoir 4-5 mois devant nous. On avait fait le bon choix. On a trois bassins de réserve, à savoir 100 000 m3, ce qui nous donne une marge sur les 36 trous, pendant une saison complète du 15 mai au 15 octobre. Pour l'heure, il n'y a eu aucune restriction sur les départs. On est là pour maintenir l'activité golfique. Mais le préfet peut nous interdire d'arroser même si nos eaux nous appartiennent. Il a toujours le dernier mot. »

Notre attachement au patrimoine est autant lié à la configuration des lieux, qui engendre une certaine obligation, qu'à une philosophie de vie. Nous avons toujours préservé et développé la biodiversité

Germain Ruste

Même si Germain Ruste n'hésite pas à avoir le cut, lui aussi : « On essaie de respecter le patrimoine, le parcours, les clients, tout en veillant à ce que la partie vaille bien les 92 euros de green-fee. Parfois, ce sont les golfeurs qui gagnent dans nos décisions, souvent c'est la nature. Pour l'heure, la plupart de nos clients se moquent que telle perruche vive au 3 du Breuil mais on pense que la sensibilisation paiera. » Christophe Prévalet l'estime également : « À un moment donné, pas tout de suite mais ça viendra, on pense que les joueurs réfléchiront à l'endroit où ils vont jouer au golf et pour quelles raisons, dans quelles conditions. » Au Gouverneur, elles sont magnifiques. En tendant l'oreille, en baissant la tête sur le fairway. Ou en la levant.