« J'entretiens une aire de jeu. » Cette phrase fondamentale résume la philosophie de Jean-Marc Legrand, greenkeeper de Saint-Germain pendant trente-trois ans, désormais à la retraite. Cet as du gazon a une formation en agronomie. Mais après que son entreprise de placage de gazon a fait faillite en Arabie saoudite, à son retour en France au début des années 80, il est embauché comme adjoint à Saint-Cloud. S'il maîtrise les graminées, en revanche, à l'époque, il ne connaît rien au golf. Jean-Marc Legrand, pour son baptême du feu, place tous les drapeaux en haut des mamelons sur les greens clodoaldiens. Des débuts ratés, mais l'homme apprend vite et est rapidement repéré. En février 1987, Saint-Germain le fait venir comme greenkeeper.
Formateur de renom
Quand il arrive au club yvelinois en 2006, François Bardet, le directeur du club, est frappé par cette phrase sur l'aire de jeu : « Jean-Marc prépare le terrain pour des joueurs. Il fait en sorte que le terrain soit impeccable pour eux, le plus agréable possible. Ça m'a ouvert l'esprit. » Ne comptez pas sur le néoretraité, trop modeste pour parler de lui. Les autres le font très bien, comme Lucas Pierré, nouveau superintendant du Golf National. Le remplaçant d'Alejandro Reyes au Golf National a été l'un des nombreux greenkeepers hexagonaux formés par Monsieur Legrand. « Jean-Marc m'a transmis la passion du métier. Sans passion, on ne peut pas réussir dans ce domaine. Il m'a encouragé, sa porte était toujours ouverte. Il m'a appris qu'il n'y avait pas qu'une seule manière de faire les choses. Chaque golf est différent, il faut savoir s'adapter. »
« Sans passion, on ne peut pas réussir dans ce domaine. »
Lucas Pierré, greenkeeper du Golf National
Le pédagogue possède la fibre de la transmission et a formé plusieurs dizaines d'intendants durant ses trois décennies dans les Yvelines. Lucas Pierré a conscience de la performance, maintenant qu'il est en responsabilité : « Ça prend du temps de former quelqu'un, c'est un investissement. Ce n'est pas de la main-d'oeuvre, il faut plus de temps qu'un ouvrier lambda. Mais il sait recruter, les personnes qui ont été attentives et ont suivi ses conseils ont tous réussi. » La liste de tous ceux passés dans l'Ouest parisien durant toutes ces années est impressionnante. De Stuart Hallett, devenu l'un des architectes les plus courus de France en passant par Rémy Dorbeau, le directeur-greenkeeper de Chantilly, ou encore Romain Basque, l'intendant de Mortefontaine et Lucas Pierré bien sûr. Que des cadors.
Échange et partage
L'infatigable Jean-Marc Legrand, toujours au service des autres, a aussi contribué à l'essor de l'Agref, l'association des greenkeepers, au début des années 90 et à la mise en place des formations de cet organisme. Malgré cela, il a réussi dans le même temps à faire de Saint-Germain un des parcours les mieux entretenus de France. Sacré challenge à relever pour celui qui va lui succéder, Jean-Éric Simonnot : « C'est un défi et une fierté. Jean-Marc est un personnage du greenkeeping. On vient se former ici pour le parcours, mais aussi et surtout pour Jean-Marc. Il donne l'envie d'aimer ce métier. J'ai pris la suite de Romain Basque comme adjoint et je me suis investi à 100 % pour pouvoir lui succéder. » Ce Corrézien pur jus, débarqué en région parisienne en 2010, a rapidement trouvé des points communs avec son mentor, comme l'amour du rugby. Lui aussi ne tarit pas d'éloges au moment d'évoquer les qualités de son prédécesseur : « Il a su évoluer avec le monde du greenkeeping. Quand il a commencé, on n'entretenait pas les parcours comme on le fait aujourd'hui, mais il s'est toujours tenu informé des nouvelles techniques, a toujours été au contact des évolutions. C'est la clé. Il a des connaissances agronomiques et scientifiques incroyables. »
« Il n'y a pas beaucoup de golfs où règne une ambiance et une paix comme à Saint-Germain »
Jean-Éric Simonnot, greenkeeper
N'en jetez plus et si vous voulez chercher la petite bête, le frère de Thomas, l'éditorialiste politique de France Inter, se définit comme un piètre golfeur et avoue qu'il n'est pas très pas passionné par les bunkers. Un comble pour un golf qui en compte 144, petit parcours de 9 trous compris. Une dernière salve de compliments avant de prendre une retraite bien méritée. Jean-Éric Simonnot : « Jean Marc est dans le partage, ne garde pas les informations pour lui, constamment dans l'échange et la discussion. Il n'y a pas beaucoup de golfs où il règne une ambiance et une paix dans le travail comme à Saint-Germain. Il sait que sans une bonne équipe avec des gens intéressés par leur métier, on n'avance pas. » Et le tout dans la plus grande sérénité : « Il anticipe, Jean-Marc, c'est la force tranquille. Il positive tout le temps. »
Salut l'artiste, les golfeurs français vous disent bravo et merci.